Proposition transactionnelle couverte par les réserves d'usage : l'avocat reste soumis à la LLCA, même en agissant en son nom propre
Un avocat, inscrit au registre cantonal, conseillait des clients en matière fiscale. Les honoraires étaient facturés à un trust géré par un trustee, lui-même avocat. Après plusieurs années, les clients mettent fin au mandat et contestent les dernières factures, qu’ils estiment excessives. Pour tenter un règlement amiable, le trustee adresse, au nom des clients, une proposition transactionnelle à l’avocat, avec la mention « sous réserve d’usage ».
Après avoir obtenu la levée du secret professionnel, l’avocat dépose une requête de conciliation et produit le courriel. Les clients le dénoncent à la Commission du barreau, qui admet qu’il agissait dans le cadre de la LLCA et que le courriel, confidentiel, ne devait pas être versé à la procédure.
L’avocat recourt à la Cour de justice, qui rejette son recours. Il saisit le Tribunal fédéral (ci-après le « TF ») et soutient ne pas être soumis à la LLCA dans le cadre du recouvrement de ses honoraires, estimant que la LLCA ne régit que l’activité professionnelle exercée pour le compte d’un tiers.
Le TF écarte cet argument, rappelant que la LLCA s’applique lorsque l’activité reprochée présente un lien direct avec l’exercice de la profession d’avocat. En matière disciplinaire, une interprétation large de la notion d’activité professionnelle s’impose, afin de préserver la dignité et la réputation de la profession. L’utilisation du papier à en-tête de l’étude ou la référence à sa qualité d’avocat constituent à cet égard des indices pertinents. En l’espèce, le recouvrement des honoraires faisait partie du prolongement du mandat. Le fait que l’avocat agissait pour son propre compte n’est pas de nature à ôter à son intervention son caractère professionnel.
Concernant la violation de l’art. 12 let. a LLCA, le recourant soutient qu’il agissait comme partie et non comme mandataire, ce qui rendait inapplicable les « réserves d’usage ». Or, selon l’art. 6 aCSD, un avocat ne peut soumettre une proposition transactionnelle au juge sans l’accord de la partie adverse ; l’art. 26 aCSD prévoit en outre que la confidentialité d’une communication entre confrères doit être explicitement indiquée et qu’elle ne peut pas être utilisée en procédure.
La jurisprudence distingue les situations où deux avocats sont mandatés de celles où un avocat traite avec une partie non représentée. Dans ce dernier cas, la confidentialité des échanges n’est garantie que si elle est expressément convenue. En l’espèce, l’avocat agissait seul en sa qualité d’avocat, et ne pouvait être assimilé à une partie non représentée. Admettre le contraire viderait de sa substance la confidentialité des échanges.
Ainsi, la violation de l’art. 12 let. a LLCA est confirmée.
Rédigé par Me Maxime Guffon